Introduction
La presqu'île de Zarzis se compose d'une vaste plaine côtière, qui s'étend de RAS MARMOUR au nord, à la vallée de l'oued Fessi au sud et d'un plateau qui englobe RAS DAHRA et Henchir ZIANE. Une bonne partie de cette plaine est occupée par deux Sebkhas. Elles sont couvertes d'une fine pellicule de sel qui, par moment et en période de chaleur intense, donnent lieu à des phénomènes de mirage fantastiques.
La Sebkha BOUJMEL est le prolongement naturel du lac D'El BIBANE, une vraie mer intérieure alimentée par le débit de deux violents courants d'eau, qui en déterminent le mouvement des marées. Cette lagune est séparée de la mer par un cordon littoral appelé " SOLB ".
Ce lac forme actuellement un véritable bassin d'élevage de poissons qui, poussés par les courants d'eau, viennent s'y reposer. La flore marine y est également abondante et riche, alors que les poissons y trouvent l'endroit idéal pour se multiplier et se reproduire.
Epoque Préhistorique
La région de Zarzis fut peuplée depuis une haute époque. De nombreux documents témoignent de la présence humaine en particulier sur les rives de la Sebkha El MELAH au sud de Zarzis.
Parmi ces documents, les géologues ainsi que les préhistoriens ont pu identifier les armatures des flèches, des microlithes géométriques Ces outils caractérisent la période du néolithique, qui s'étend entre 3000 et 2000 avant JC.
Epoque phénicienne ou les origines de Zarzis (Gergis)
D'après les sources antiques, la cote sur laquelle s'élevaient le site et le port de GERGIS avait attiré de bonne heure les phéniciens. Ceux-ci fondèrent de nombreuses " villes comptoirs " sur les rivages sur la petite SYRTE, qui s'étend de Gabès jusqu'au cap de MISRATA en Libye.
Parmi ces villes, citons en particulier GEKTHIS (Boughrara) et GERGIS (Zarzis).
Ses fondations auraient été conçues pour servir le commerce et garantir aux navires phéniciens qui sillonnaient la Méditerranée des abris surs. La plupart de ces villes comptoirs se transformèrent peu après en colonies.
Tout porte à croire donc que les origines de Gergis, comme celles des autres Emporia de la petite SYRTE, sont phéniciennes.
Epoque Punique
Elle commence dès le IXème siècle avant JC, date de la fondation de Carthage par les Phéniciens.
La colonie de Carthage impose progressivement son hégémonie à l'ensemble des colonies phéniciennes de Méditerranée occidentale son empire fut vaste. Il se composait de riches colonies en Sicile, en Sardaigne et sur les cotes de l'Afrique du Nord de Leptis Magna (en Libye) à l'est jusqu'à Lixus (au Maroc) à l'ouest.
Dans la presqu'île de Zarzis, des vestiges de la civilisation punique ont été repérés à Jdaria à Chammakh et à Henchir Ziane. Il s'agit le plus souvent de nécropole ou de sanctuaires.
Epoque Romaine
Au printemps 146 avant JC, quand Carthage était rasé, Rome décida de s'approprier le domaine du vaste empire carthaginois. Elle commença par prendre possession des terrains fertiles parmi ceux-ci, la presqu'île de Zarzis qui possède une position stratégique importante.
Vu son importance, cette région abonde de sites et monuments archéologiques. Les sources antiques ont parlé souvent du municipe de ZITHA du pont ZITHA (chaussé romaine) du PRAESIDIUM (El Bibane) mais ZITHA fut certainement le site le plus connu dans son historiographie antique.
D'autres ruines ont été repérées dans la région, mais beaucoup sont indistinctes en raison de la nature des matériaux (gré, calcaire tendre et friable).
Sur le plan administratif, à cette époque, Zarzis appartenait à la province d'Afrique proconsulaire, qui englobe aujourd'hui le secteur nord ouest de la Libye, la Tunisie et le Constantinois algérien.
A la fin du III ème siècle après JC, après le morcellement de cette province, la région de Zarzis fit partie de la province de Tripolitaine, qui englobait le sud entre le Jérid et le fond de la grande Syrte.
A l'époque romaine, ZITHA était le centre d'une importante colonisation antique. Sa position sur la grande voie de Carthage à Lebda (Lesptis Magna) lui a permis une rapide expansion. La prospérité de ce site fut longue. C'est sous le règne de l'empereur CARACALLA (212-217), fils de SEPTIME SEVERE (originaire de Lebda), que la route qui unissait Zitha et Leptis Magna subit une réflexion importante. Quelques années plus tard, sous Constantin (306-337), on enregistre une nouvelle réparation. Ces travaux témoignent de la vitalité de ZITHA et de son importance, en particulier sur le plan économique. Les monuments de ZITHA sont importants. Ils sont en majorité ensevelis. Parmi eux, nous citons :
- Le FORUM dont le pavage est constitué de grandes dalles, il est entouré de portiques.
- Un temple consacré à la divinité romano-africaine CAELESTIS. Il comprend trois pièces réservées au culte.
- De nombreuses statues, ainsi que des inscriptions puniques et latines.
Epoque Byzantine
Gergis été plusieurs fois évoquée dans l'historiographie byzantine. Au sud de la ville actuelle (à Sidi Bouteffaha ), les auteurs ont pu identifier un Boy et un Havre
Epoque Arabo-Musulmane
En 648, l'autorité byzantine s'effondra en Afrique du nord
devant les cavaliers arabes venus d'Egypte et leur chef ABDALLAH IBN
ABI SAAD défit les armées byzantines à SUFETULA
(Sbeïtla).
Les Arabes pénétrèrent ainsi au Maghreb qui
désignèrent sous le nom d'Ifriqiyya .
Au Xieme siècle, comme l'ensemble du pays, Zarzis a subit la
grande conquête arabe venue d'Egypte, celle des Beni HILLAL et
surtout des Beni SOULEIM dont les DEBBAB constituent
l'élément fondamental refoulant ainsi la population
berbère dans la montagne et dans l'île de Djerba.
Les habitants actuels de ZARZIS ou la légende des ACCARAS
Les habitants actuels appelés ACCARAS se sont
installés tout récemment dans la région de
Zarzis, c.-à-d. vers la fin du XVIème siècle.
Ils sont originaux de la SAKIET El HAMRA en Mauritanie qu'ils
auraient fuie pour des raisons inconnues. La tribu des ACCARAS
s'installa d'abord au sud de l'Algérie puis dans le Sahel
tunisien pour reprendre la route vers le sud dans l'intention de
regagner la Mecque pour le pèlerinage.
Arrivés à MEDENINE, Sidi MAKHLOUF El MAHBOULI et Sidi
ALI BEN OBEID se séparent de la caravane pour s'installer
définitivement dans la DAKHLA OUERGHEMMA. Sidi KHLIFA ESSAYEH
conduit le reste de la tribu vers BEN GUERDANE prochaine étape
sur l'itinéraire du pèlerinage. Mais à BEN
GUERDANE, Sidi ESSAYEH tombe gravement malade et il meurt. Ces
enfants ALI , MHEMMED et SAID décidèrent d'aller
à Zarzis, car les conditions étaient
défavorables à la poursuite du long voyage de la
Mecque.
A l'arrivée des ACCARAS les terres étaient
occupées par les Nouails venus de la Libye. Aussi, ils
s'adonnèrent à la pêche puisque c'était
leur seule débouché pour le commerce à la suite
des relations établies avec Djerba.
L'instinct nomade l'emporta et les Nouails abandonnèrent les
terres qu'ils possédaient. Les ACCARAS,
considérablement augmentés en nombre, prirent
possession de ces terres en friche.
En quelques années, l'agriculture devint très
prospère grâce au labeur et a la
persévérance des nouveaux maîtres.
Mais le temps réservait une désagréable surprise
à ces courageux Fellahs. Les Nouails reviennent pour
réclamer leur dû. On partage loyalement le butin. Les
années passent et les réclamations deviennent de plus
en plus oppressantes. On a recours aux armes. C'est la guerre qui
dorénavant va opposer les deux tribus belligérantes.
C'est aussi l'épuisement qui va affecter surtout les ACCARAS
dont la plupart meurent. Il y eut une période où il
n'en restait que 40 hommes capables de porter les armes. Alors c'est
la fuite, le débâcle.
Durant cette période douloureuse allait se tisser une
glorieuse époque dont l'héroïne fut une femme :
elle s'appelait Gammoudi. Les combats meurtriers lui avaient
ôté ce qu'elle avait de plus cher au monde : son mari et
ses deux enfants tous morts au combat. La pauvre femme ne versa
aucune larme et jura de les venger. Elle enleva ses habits de femme,
ses bijoux, se rasa le crâne et mit des vêtements de
cavalier. Elle parcourut la région de haut en large, ramena
les fuyards et rapatria les autres. Elle reconstitua sa tribu puis se
dirigea vers ses voisins de BEN GUERDANE. Les TOUAZINE lui
prêtèrent main forte. Alors elle avança à
la tête des combattants à l'intérieur de la
Libye. Elle surprit les Nouails et leur infligea une lourde
défaite. Elle revient à Zarzis, déposa les
armes, remit son Fouta et sombra dans la détresse. Elle pleura
tellement qu'elle perdit la vue et mourut aveugle vers 1760
après avoir écarté le danger.
Pour lui témoigner leur gratitude, les marins de Zarzis
construisirent un petit mausolée sur la butte qui domine le
village. Le petit mausolée va se transformer pour devenir ce
qu'est aujourd'hui la grande mosquée de Zarzis.
En ce temps, le souverain de Tunis Ali Bey dépêcha ses
émissaires pour construire une union entre toutes les tribus
OUERGHEMMA et les ACCARAS. Ce fut fait et les ACCARAS
occupèrent alors les terres qui longent le littoral depuis la
sebkha jusqu'à la région de CHOUCHA, laissant
l'arrière pays au TOUAZINE. Semi-nomades puis
sédentaires, ils menèrent une vie de labeur fructueuse,
qui donna à Zarzis cette belle parure verte, une forêt
d'olivier qui s'étend à perte de vue.
A la veille de l'occupation française, la presqu'île
possédait déjà ses oasis, ses jardins et son
oliveraie.
Le 28 juillet 1881, l'amiral CONRAD à bord d'un croiseur
cuirassé accosta à Zarzis. Les troupes
françaises débarquèrent et obligèrent les
zarzisiens à se soumettre. Ce fut une période
pénible et insupportable, caractérisé par
l'anarchie, les troubles et l'insécurité. Ce n'est que
vers 1887 que l'administration coloniale pu établir son bureau
des affaires indigènes qui dépendait du commandement de
la région militaire de Gabès.
Placés sous un régime militaire, plus de 20000 hectares
de terres appartenant aux différentes tribus des ACCARAS ont
été donnés à une douzaine de colons
français. Malgré ce régime militaire, la
population a joué un rôle important dans le mouvement de
libération nationale.