KAHINA AL- (morte en 704/05) reine
berbère semi-légendaire
Surnom de la «reine des Aurès» signifiant
«la Prophétesse». Al-Kahina régna sur
plusieurs tribus de Berbères de lAurès, dont la
sienne propre, celle des Djarawa, de 685 environ à 704 ou 705.
À la fin du VIIe siècle, lAfrique du Nord voit
saffronter trois forces : les Byzantins dabord,
solidement implantés sur les côtes, avec Carthage
surtout et Septem (Ceuta) comme points dappui ; les Arabes,
ensuite, qui arrivent de lest et tentent de
pénétrer en Ifriqiyya (actuelle Tunisie) et, de
là, dans tout le Maghreb (Occident) ; les Berbères
enfin, habitants des lieux, groupe homogène du point de vue
ethnique mais profondément divisé selon quils
sont nomades ou sédentaires, agriculteurs ou citadins
commerçants, chrétiens ou juifs. Carthage tombe (695)
devant Hasan ibn al-Numan al-Ghassani, nouveau gouverneur de
lIfriqiyya. Lempereur Léontios réussit
à reprendre la ville, mais seulement pour trois ans. De son
côté la Kahina parvient à refaire
lunité berbère autour de sa personne et de sa
tribu. Elle écrase larmée dIbn
al-Numân, sur les bords de la Miskiyâna
(près de Tébessa) dans le Constantinois et la repousse
en Tripolitaine. En 798, Ibn al-Numan reporte ses efforts sur
Carthage quil enlève, mettant les Byzantins en
déroute : la maîtrise des mers dans le bassin occidental
de la Méditerranée passe aux Arabes. Ibn al-Numan
fonde Tunis.
Un seul obstacle se dresse encore devant lavance des Arabes
vers louest : la Kahina et le royaume quelle a
constitué au Maghreb. Âme dune résistance
intransigeante, elle aurait pratiqué la politique
désespérée de la terre brûlée,
saccageant le pays, détruisant les villes et brûlant les
plantations pour en détourner les Arabes et les
décourager. Cette politique lui aliène la population
sédentaire, tant citadine (grecque et berbère) que
campagnarde. Ibn al-Numan tire parti de cette situation,
réclame et reçoit des renforts armés que le
calife Abd al-Malik vient de lui envoyer (702) et reprend
loffensive. La tradition veut quà la veille de la
bataille quelle savait décisive, la Kahina,
plaçant lintérêt de la famille avant celui
de la tribu, ait intimé lordre à ses deux fils de
rejoindre les rangs des Arabes. Y ont-ils, en sus, reçu un
commandement et poursuivi la guerre contre les Berbères ;
Certaines sources le prétendent. La bataille eut lieu à
Tabarqa. La Kahina y fut vaincue et décapitée au lieu
dit depuis Bir al-Kahina (le puits de la Kahina). La voie vers
lAtlantique était ouverte aux Arabes. Lhistoire de
cette femme fougueuse et indomptable (la «Déborah
berbère») est en grande partie légendaire : les
romanciers sen sont emparés.